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Il y a 60 ans le 3 février 1962

John Kennedy imposait un embargo à Cuba

 

L'embargo des États-Unis contre Cuba décrit à Cuba par le terme espagnol el bloqueo qui signifie « le blocus » est un embargo économique, commercial et financier à l'égard de Cuba par les États-Unis mis en place le  à la suite de nationalisations expropriant des compagnies américaines.

Jusqu'en 2021, l'embargo est officiellement toujours en place, ce qui en fait le plus long embargo commercial de l'époque contemporaine. Cependant, pendant la présidence de Barack Obama, les exportations de produits alimentaires et de médicaments sont redevenues légales, bien qu’encore soumises à de lourdes restrictions,. Les États-Unis sont ainsi redevenus les premiers fournisseurs de produits alimentaires de Cuba et assurent entre 35 et 45 % des importations de nourriture de l'île.

Sous la présidence de Donald Trump 240 sanctions sont au contraire mises en place, et 9 jours avant la fin de son mandat, il classe l'île dans les groupes terroristes

L'embargo demeure un sujet particulièrement controversé : la controverse est notamment alimentée par l'emploi, à la place d'« embargo », du mot « blocus » par les partisans de Cuba. Ce dernier terme est parfois repris par l'Assemblée générale des Nations unies, qui a condamné en 2009 pour la  fois le « blocus » dans le communiqué version française et l'« embargo » dans la version anglaise, par 187 voix contre 38.

L'Union européenne est opposée à l'embargo car il affecte ses propres relations commerciales, elle soutient en revanche « un processus de transition progressif et pluraliste et qui permette d'améliorer le niveau de vie des Cubains ».

Les pertes occasionnées par l’embargo à l’économie cubaine s’élevaient en 2014 à plus de 116 milliards de dollars

Un peu d'histoire

La guerre d'indépendance de Cuba colonie espagnole

Les États-Unis et Cuba ont des liens géographiques, économiques et historiques étroits. Cuba fut une colonie espagnole pendant 400 ans, et les nombreuses luttes pour l'indépendance de cette période culminèrent avec la guerre de Dix Ans (1868-1878) et la guerre d'indépendance cubaine (1895-1898). Durant ces derniers évènements, une explosion aux origines controversées détruit l'USS Maine, un navire de guerre de l'US Navy qui était alors ancré dans la baie de La Havane, causant également la mort de plusieurs hommes d'équipage. Ce drame permet aux États-Unis d'entrer dans une guerre contre l'Espagne (accusée d'être derrière un éventuel sabotage), durant laquelle un corps expéditionnaire américain de 17 000 hommes débarqua sur l'île le 20 juin 1898, appuyé en mer par la Marine. La guerre hispano-américaine se termine par la défaite des Espagnols qui sont contraints de reconnaitre l'indépendance de Cuba par le traité de Paris.

L'occupation américaine de l'ile

En dépit de la déclaration d'indépendance de Cuba, les Américains occupent l'île de Cuba durant cinq années qui suivent. Bien qu'ils évacuent l'île en 1902, l'amendement Platt, sous le prétexte que les États-Unis se portent garants de la constitution cubaine, leur accorde le droit d’intervenir dans les affaires de Cuba en cas "d'effondrement constitutionnel". Afin de remplir cette mission, ils conservent donc des bases navales : Guantánamo et Bahía Honda. Les États-Unis gardèrent des rapports privilégiés avec l'île en investissant dans la production de sucre et de tabac qu'ils achetaient à bas prix, dans le tourisme ainsi qu'en concédant diverses préférences aux importations cubaines. De ce fait, Cuba considère la période qui va de 1899 à 1902 comme une occupation militaire, et celle de 1902 à 1958 comme une période néo-coloniale

Le gouvernement des États-Unis a initialement soutenu la révolution cubaine, pensant qu'elle n'était pas d'orientation marxiste. Washington reconnait alors le nouveau gouvernement de Manuel Urrutia le , après la fuite de Batista le  janvier. Cependant, les relations entre les deux États se sont très vite détériorées. Fidel Castro est désigné Premier ministre en février 1959 et opère un rapprochement avec l'Union soviétique.

Le 6 février 1959, un rapport de la Banque nationale de Cuba consigne le dépôt dans des banques nord-américaines de 424 millions de dollars retirés de la Banque centrale cubaine par l'entourage de Batista juste avant sa fuite. Pas un seul centime n’a été restitué par les banques américaines. Ce qui n'empêche pas, six jours plus tard le , le Conseil National de Sécurité des États-Unis de refuser un crédit sollicité par la Banque Nationale de Cuba pour soutenir la monnaie cubaine.

Le nouveau gouvernement procéda à une nationalisation le  : la loi de Réforme Agraire est décrétée. Elle nationalise toute propriété de plus de 420 hectares pour les redistribuer aux paysans, aux locataires et aux sans-terre12. De nombreuses propriétés appartenant à des citoyens ou des sociétés nord-américaines furent ainsi nationalisées sans compensation.

Le  4 février 1960, l'Union soviétique signe un accord commercial avec Cuba.

La politique anti -cubaine de Kennedy

Avril 1961 est marqué par un raid aérien américain contre les aéroports de la Havane et Santiago suivi du débarquement de 1 500 mercenaires à la baie des Cochons. Cette opération armée échoue en 72 heures du fait de la résistance cubaine

Le débarquement de la baie des Cochons est une tentative d'invasion militaire de Cuba par des exilés cubains soutenus par les États-Unis en avril 1961. Planifiée sous l'administration de Dwight D. Eisenhower, et organisée par la CIA, l'opération fut lancée au début du mandat de John F. Kennedy. Elle visait à faire débarquer à Cuba, le , environ mille quatre cents exilés cubains recrutés et entraînés aux États-Unis par la CIA. Leur objectif était de renverser le nouveau gouvernement cubain établi par Fidel Castro, qui menait une politique économique défavorable aux intérêts américains et se rapprochait de l'URSS1. L'opération fut un échec complet et les prémices d'une grave et profonde dissension entre la présidence et les services secrets américain

Le , l'Organisation des États américains (OEA), par 14 voix contre 6 (ArgentineBolivieBrésilChiliÉquateurMexique), exclut Cuba. Toutes les relations commerciales, diplomatiques et aériennes entre l'île et les autres pays du continent sont rompues (sauf avec le Mexique et le Canada). L'embargo est partagé par les alliés occidentaux des États-Unis, sauf entre autres par le Canada, la France et l'Espagne. Cuba est presque totalement isolé. L'Union soviétique augmenta alors son aide financière à Cuba.

En réponse au rapprochement de Cuba de l'Union soviétique pendant la guerre froide et à la suite de la vague de nationalisations le président John F. Kennedy a étendu les sanctions en élargissant le champ des restrictions commerciales. Le , par l’ordre exécutif présidentiel 3447, est mis en œuvre formellement l’« embargo » total du commerce entre les États-Unis et Cuba. Kennedy a imposé des restrictions aux voyages vers l'île. Le , le département du Trésor nord-américain annonce l’interdiction de l’entrée sur le territoire nord-américain de tout produit élaboré, totalement ou partiellement, avec des produits d’origine cubaine, même dans un pays tiers. En juillet 1963 entre en vigueur le règlement pour le contrôle des actifs cubains qui interdit toutes les transactions avec Cuba et ordonne le gel des avoirs de l’État cubain aux États-Unis. En mai 1964, le département du Commerce établit l’interdiction totale des embarcations d’aliments à destination de Cuba, bien que dans la pratique celles-ci ne s’effectuaient déjà plus. Le 21 août 1975 l'interdiction faite en février 1962 aux pays de l'OEA de commercer avec Cuba fut levée après accord du président américain Gerald Ford. Les négociations avec l'URSS et les pays de l'Est pendant la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe à Helsinki, relatives à la libre circulation des biens, des personnes, des idées, au droit à l'autodétermination des Etats, expliquent ce geste américain. 

Sous la présidence démocrate de Jimmy Carter, les Américains d'origine cubaine furent autorisés à aller à Cuba entre septembre 1977 et avril 1982..

L'administration Bush impose de nouvelles sanctions en 2004. Un Américain souhaitant se rendre à Cuba doit prouver auprès du département du Trésor avoir au moins un membre de sa famille (parents, fratrie, grands-parents) vivant dans l'ile, ne peut séjourner dans l'ile plus de quatorze jours tous les trois ans (au lieu d'un voyage par an auparavant), et ne peut dépenser plus de 50 dollars par jour. En outre, les envois d'argent des Cubano-américains à un membre de leur famille sont limités à 100 dollars par mois et sont interdits si la personne est membre du Parti communiste de Cuba.

 En 2006, les États-Unis sont les premiers fournisseurs de produits alimentaires de Cuba. En 2008, entre 35 et 45 % des importations alimentaires à Cuba viennent des États-Unis, qui sont devenus les premiers fournisseurs de nourriture de l'île.

L'embargo a été une nouvelle fois assoupli sous la présidence de Barack Obama : en mars 2009, le Congrès autorise les citoyens américains d'origine cubaine à se rendre à Cuba une fois par an1 ; puis, le , le président annonce la fin des restrictions sur les voyages et les transferts d'argent des Américano-Cubains vers l'île1. Il est alors encore interdit d'envoyer de l'argent à des membres de la fonction publique ou de l'armée cubaine1.

En 2009, le département du Trésor des États-Unis a ordonné la fermeture de plus de 80 sites Internet qui faisaient du commerce avec Cuba

Malgré les difficultés créées par l'embargo dans les années 1990, Cuba ne s'est pas effondré, comme le supposaient certaines conjectures formulées lors de la fin de l'Union soviétique.

Malgré les difficultés créées par l'embargo dans les années 1990, Cuba ne s'est pas effondré, comme le supposaient certaines conjectures formulées lors de la fin de l'Union soviétique.

 

En 1999, les exportations officielles américaines vers l'île s'élèvent à 4,7 milliards de dollars, constituées principalement d'aide médicale et d'autres dons caritatifs. Cuba est  sur 180 dans la liste des importateurs de produits agricoles américains en 2000. 

Sous la présidence de Donald Trump, 190 sanctions sont imposées à Cuba en quatre ans, dont notamment l'interdiction des croisières américaines et les obstacles à l'envoi d'argent de leurs proches vers l'île, notamment

Les entreprises américaines du domaine de la santé arrêtent d'envoyer des médicaments vers Cuba, de peur de représailles du gouvernement Trump. Les nouvelles lois sanctionnent tout importation de médicament vers Cuba si elles contiennent au moins 10 % en est produit aux États-Unis.

L'embargo a un impact significatif sur le secteur de la santé. Près de 80 % des brevets du secteur médical sont déposés par des multinationales pharmaceutiques américaines, et Cuba ne peut donc en bénéficier.

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme indique que « les restrictions imposées par l'embargo ont contribué à priver Cuba d'un accès vital aux médicaments, aux nouvelles technologies médicales et scientifiques. » L'embargo a également compromis l’opération « Miracle » : la compagnie espagnole Hola Airlines, qui transportait vers l'île des patients latino-américains atteints de maladies oculaires, a rompu le contrat qu'elle avait avec Cuba, le fabricant américain Boeing refusant d'effectuer des réparations sur ses appareils. En avril 2020, dans un contexte de pandémie de Covid-19, les États-Unis font bloquer un envoi chinois de matériel médical à destination de Cuba par le biais de l'embargo, puis menacent de durcir les sanctions, critiquant sévèrement les missions médicales cubaines à l'étranger.

En janvier 2021, neuf jours avant la fin de son mandat de président des États-Unis, Donald Trump impose de nouveau des sanctions contre Cuba, celle-ci déjà durement touchée par le renforcement de l'embargo américain en pleine pandémie de coronavirus se voit classée comme terroriste, un classement que le président Obama avait retiré en 2015. Pour le gouvernement cubain et le think-tank américain Washington Office on Latin America (Wola), il s'agit d'« opportunisme politique ».

Le ministre des affaires étrangères de Cuba estime que l'embargo imposé par Donald Trump aura coûté 20 milliards de $US à Cuba

À la suite des manifestations du 11 juillet 2021 à Cuba,  Miguel Diaz-Canel demande à ses partisans de défendre la Révolution dans la rue et accuse les États-Unis d'être à l'origine de cette contestation. Il met également en avant le rôle des sanctions renforcées depuis le mandat de Donald Trump, asphyxiant le paysJoe Biden appelle « le régime cubain à entendre son peuple » et son « appel vibrant à la liberté ». Il propose d'aider la population en envoyant de façon importante des doses de vaccin anti-Covid, puisque le régime cubain a refusé d'adhérer au dispositif COVAX. Il offre également l'aide des États-Unis pour rétablir internet. Le président mexicain Andres Manuel Lopez Obrador réagit à ses échanges en proposant d'envoyer de l'aide humanitaire tout en proclamant que l'ingérence n'a aucune place à avoir. Des sanctions symboliques sont prises par les États-Unis contre le ministre de la défense cubain Álvaro López Miera et contre une unité spéciale anti-manifestation, gelant leurs accès et leurs avoirs financiers aux États-Unis.

Jusqu'à quand « la plaie américaine » va t- elle « interférer dans les affaires cubaines ???

De nombreuses voix dans la communauté internationale s'élèvent contre cet embargo. Ainsi à l'Assemblée générale des Nations unies, de nombreuses résolutions proposant aux États-Unis de cesser leur embargo sur Cuba ont été votées, à une très large majorité.

En juin 2021, seuls deux États, les États-Unis et Israël, sur plus de 190 ont voté contre la résolution demandant la fin totale de l'embargo.

Aujourd'hui encore de nombreux intellectuels et personnalités réclament l'abandon de cet embargo.

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Sources :Wikipédia

Ariel ColonomosLa modernité d'un archaïsme : l'embargo cubain au défi des critiques adressées à la loi Helms-BurtonCERICNRSScience Po,  « Les Études du CERI » ( 63),  (lire en ligne [archive])

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Tag(s) : #Il y a 60 ans le 3 février John Kennedy imposait l'embargo à Cuba, #Histoire
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