Barcelone : place forte des anarchistes, capitale de la catalogne et de la Révolution libertaire ; de nombreux partis et syndicats se partageaient et se disputaient le pouvoir : POUM, UGT, CNT, socialistes, communistes, anarchistes ( en grande majorité)....elle vécut l'expérience de l'autogestion des entreprises, des magasins du peuple, de la gratuité de l'électricité, de l'eau ..
« S'il n'y avait pas eu les bombes » nous aurions été les plus heureux du monde « (témoignage de Angèle Cruz ma mère) .Nous ne payions ni eau ni électricité : les logements étaient gratuits, les propriétaires étaient partis à l'étranger. On pouvait échanger du café du sucre que nous gagnions à l'usine de café où je travaillais ( café de la Garza) contre toute autre nourriture.. On avait des bons pour obtenir des chaussures, et tout ce dont on avait besoin."
Ma grand-mère qui tomba malade, fut soignée gratuitement.
".Mais il est vrai qu'il y avait beaucoup de misère et que nous étions privilégiées en travaillant dans cette entreprise de café gérée par les ouvriers et les ouvrières...Nous avions une liasse impressionnante de billets, comme nous n'en avons jamais eu. Durant toute notre vie, mais avec la défaite républicaine l'argent Républicain ne valut pas grand chose mais on ne pouvait rien acheter car il n'y avait rien. « Les curés et les prêtres avaient disparus ainsi que les bonnes soeurs.. « Ils s'habillaient en civil. « D'ailleurs les riches aussi avaient disparus, on ne voyait plus par les Ramblas ces bourgeoises avec leurs domestiques leurs nurses en uniformes , bien habillées promenant leurs enfants, coiffées de grands chapeaux, parées de bijoux pour les dames et pour les messieurs, ces couvre-chefs si arrogants.. Plus personne n'arborait l'ancienne tenues vestimentaire bourgeoise : porter la cravate, c'était courir le risque d'aller en prison."
Les 58 églises de Barcelone ( à l'exception de la cathédrale) furent incendiées. Les écoles catholiques furent fermées, et les nouvelles écoles fondées sur le principes rationalistes du travail et de la fraternité humaine virent le jour.
La restitution par les monts de piété de tous les gages d'une valeur inférieure à 200 pesetas et la semaine de quarante heures furent décrétées en Catalogne.
A Barcelone,la Généralité (gouvernement catalan) organe politique se substitua au pouvoir central de l'Etat...
.Après trois ans d'expérience révolutionnaire, Barcelone tomba sous le joug nationaliste :
"En tête c'était les troupes marocaines , « les maures », avec des soldats avec la tête enroulée d'un foulard qui défilèrent sur les Ramblas . Il était interdit de parler la langue catalane ,et la culture catalane et notamment la musique et la danse « la sardane ». témoignage A. Cruz).
Les propriétaires retrouvèrent leurs biens immeuble usines..Pour se venger , ils fermèrent quantité d'usines qui avaient tournées en auto-gestion et vendirent les à des agents immobiliers. Le chômage prit le dessus : Franco aida ses amis Hitler et Mussolini (de 1940 à1944) en leur expédiant tout ce que l'Espagne produisait dans ses vergers, ses champs ses usines et le peuple mourait de faim. On trouvait au marché noir à des prix fous, des denrées de première nécessite..Les indigents, les pauvres, les enfants s'ils voulaient avoir droit à la soupe populaire , devaient aller à l'Eglise et assister à la messe sans quoi, on ne leur donnait pas un ticket pour manger..Les loyers étaient inabordables : les propriétaires de retour dans leurs biens en avaient doublé triplé le loyer de sorte qu'il fallait vivre à plusieurs familles pour pouvoir payer un appartement. Plusieurs payes n'y suffisaient pas;les expulsions étaient fréquentes. Et des familles entières logeaient dans la rue et la nourriture était hors prix.
« Combien de fois sommes -nous allés nous coucher sans manger après 12 heures de travail et le matin seulement avec un peu de lait dissout dans de l'eau pour repartir travailler à pied car le métro était trop cher ! »; Le peuple crevait de faim » Angèle Cruz témoigne, elle qui est restée 14 ans à Barcelone : 7 ans avec les républicains et 7 ans avec les franquistes ».Il fallait punir le peuple de Barcelone pour avoir soutenu les rouges. La chasse aux rouges était sans pitié et cruelle : les dénonciations allaient bon train...Des gardes civils faisaient le tour des maisons et des foyers, pour trouver d'anciens républicains.Des gardes civils péntraient dans les maisons sans mandat et questionnaient les gens. Mon oncle pour avoir plaisanté sur une arme à l'usine où il travaillait fut dénoncé et arrété. Un autre oncle pour avoir été caporal sous les troupes républicaines (alors qu'il n'avait que 18 ans) ,fut incorporé d'office dans l'armée nationaliste pendant trois ans sans droit de sortie. Il était très difficile de trouver du travail. Les riches réapparurent avec leurs chapeaux et leur impudences comme si rien n'avait changé ! Comme si les 7 années de République et les trois années de révolution n'avaient jamais existé. Il fallait tout effacer,tout oublier pour redevenir comme avant et avant c'était avant la République, avant l'émancipation des hommes et c'est ainsi que la Catalogne Barcelone et l'Espagne feront un saut de 50 ans en arrière et s'endormir pour 75 ans !