Chapitre I : Alexis

L'histoire se passe dans la Russie des stars, où le peuple en majorité était composé de paysans : des serfs attachés aux terres du seigneur.
C'était le lendemain du Noël Russe le 7 janvier.Alexis n'avait pas fêté la Nativité, comme l'immense majorité des paysans pauvres de son pays.

Il vivait dans une simple isba (propriété de son seigneur), avec sa femme Natacha leur fils unique Boris et les parents de son épouse : Sergueï et Ivanovna.
Il sortit ce matin glacial afin de récupérer près de la haie, du bois mort pour réchauffer l'unique pièce qui leur servait de cuisine ,et de chambre à coucher .C'est alors qu'il croisa un vieillard affolé qui sortait de la forêt.

L' homme tenait en ses mains osseuses, deux lièvres. Il avait du relever les pièges posés par l'intendant . Or il était interdit à quiconque de braconner sur le domaine du maître, et de voler son gibier .La punition était terrible à celui qui enfreindrait la loi : 10 coups de fouet en place publique, 10 jours d'emprisonnement et le bannissement à vie pour lui et toute sa famille !!Le vieillard se trouva nez -à -nez avec Alexis alors que l'intendant et les chiens arrivaient. Alexis spontanément se saisit des deux lièvres :
-Rapporte-moi ces deux lièvres ! Ordonna l'homme du Seigneur ,et va t'en !
-C'est moi qui les ai pris ! S'accusa à tord , Alexis.
L'intendant le fixa :
-Je sais que ce n'est pas toi mais lui ! désignant le vieillard.
-Non ! Insista courageusement Alexis ! C'est moi !
Arriva alors le Seigneur :

-Eh bien puisque c'est « lui » comme il le dit, emmenez- le !
Et les gardes saisirent Alexis. Le vieillard lui adressa un sourire de reconnaissance mais ses yeux trahissaient son inquiétude .
-Ne vous en faites pas ! Lui murmura Alexis !
Alexis avait pris la place de ce pauvre vieux qui poussé par la misère avait volé les lièvres. Il savait que jamais il n'aurait pu résister aux 10 coups de fouet ni à l'emprisonnement dans la tour glacée du château .Il venait de lui sauver la vie en mettant la sienne en danger.
Alexis fut fouetté devant la population sous les yeux de toute sa famille..Puis il fut enfermé dans le donjon .
Le vieillard fut recueilli par la famille du courageux jeune homme.

Il put ainsi se reposer un temps.
-Quand Alexis sortira du cachot nous devrons quitter l' isba qui appartient au Seigneur ! Lui expliqua Natacha. Nous sommes bannis et nous devrons quitter la province à jamais !
-Je suis désolé ! Dit le vieux en sanglotant ! Si désolé d' avoir ainsi bouleversé votre vie ! Et vous avoir fait autant de mal !
-Cessez de pleurer ! Lui dit doucement Ivanovna (la mère de Natacha) ce n'est pas votre faute ! C'est le seigneur qui est responsable de toute notre misère !
-Mais un jour viendra où les pauvres se révolteront et ce jour là, à ce maudit seigneur , le peuple lui réglera son compte ! S'était écrié Sergueï.
-Tais-toi ! (Coupa Ivanovna ). Si quelqu'un t'entendait nous serions tous bons pour le cachot et pire encore !
La famille réconforta le vieillard qui se calma et apprécia les quelques jours qu'il partagea avec ces braves gens.
Alexis réussit à s'enfuir du château grâce à un des gardes à qui il avait sauvé la vie de son enfant , tombé dans un puits... l'été dernier.
Il se rendit chez lui et avec toute sa famille et le vieil homme , ils s'enfuirent tous dans la nuit...
Chapitre II
Alexander
Dans une province voisine vivait un maréchal-ferrant nommé Alexander.

Très apprécié dans le village,il n'en demeurait pas moins un homme peu facile avec un caractère entier mais juste et honnête. Il arriva qu'un jour avant Noël, une troupe de musiciens ambulants s'installa dans le village. Parmi ces tziganes il y avait un jeune adolescent d'une quinzaine d'année qui avait la peau noire. Tous les villageois s'en moquaient et les enfants ne se privaient pas de lui jeter des pierres. Un vol fut commis dans un magasin de nourriture : l'argent avait disparu de la caisse .On accusa les bohémiens et en particulier le pauvre garçon noir ! Il fut battu en place publique ...On voulait même le faire brûler .Mais ce n'était pas lui l'auteur du vol. Alexander prit sa défense

-Avez vous des preuves ? Hurlait- il ?
-Je jure que ce n'est pas moi ?
-Alors qui ? Hurlait la foule en colère .
Mathias la victime du vol, qui n'aimait pas Alexander à cause d' une vieille querelle de famille , se désespérait : cet argent ,il le devait à l'intendant du seigneur qui lui réclamait des impôts.
-Bah ! Dit Alexander . Allons lui expliquer la situation.
L’intendant ne voulut rien savoir ! Il voulait l'argent pour le seigneur et il ordonna même de mettre à la torture le pauvre noir pour obtenir ses aveux.
Le jeune étranger réussit à fausser compagnie à l'assemblée et s'enfuit en direction du lac gelé, et des montagnes cernées par les loups .
Les villageois le laissèrent filer :
-Sûr qu 'il n'ira pas loin : le lac, les loups !
-Oui nous le retrouverons demain mort de froid ou à moitié dévoré !

Alexander , cependant ne rentra pas chez lui . Il suivit le chemin du fugitif , et s'approchant du lac gelé entendit des cris :
-Au secours !
C'était le garçon qui était tombé dans l'eau.
Alexander lui sauva la vie en le rattrapant, et le ramena dans sa maison. Là ,il le réchauffa et le soigna.
-Merci ! Lui répondit l'adolescent. Je m'appelle Gaspard. J'étais un prince dans mon pays mais je fus fait prisonnier et vendu comme esclave au tsar mais je me suis enfui et les bohémiens m'ont caché. Vous savez je n'ai pas volé l'argent ! C'est Mira la jeune danseuse qui l'a fait !
-Il faut rapporter cet argent ! Lui dit Alexander ! Un vol est un vol !
-Je sais dit Gaspard ! Je n'étais pas du tout d'accord !
-Je vais m'en charger !
Alexander se rendit auprès des bohémiens et demanda à Mira de rendre l’argent. Ce qu'elle fit. Alexander promit d'inventer une histoire où aucun bohémien ne serait compromis .

Il se rendit donc chez le marchand qui ne l'appréciait guère .Il s'arrangea pour être seul dans le magasin et glissa la cassette avec l'argent, sous le présentoir. Mais le marchand l'avait espionné . Alexander par la suite, expliqua les choses à sa manière .
Il raconta au seigneur que la cassette était là avant son arrivée dans le magasin !
-Voler une cassette et la remettre à sa place un jour plus tard ? Cela est bien étrange !
-L'Argent est là ! C'est ce qui compte ! clamait Alexander .
Mais le marchand insistait et voulait faire condamner Alexander avec les bohémiens.
Le Seigneur qui estimait Alexander ne put le défendre : les apparences étaient contre lui .Il lui demanda alors de quitter le village et la région sur l'heure, ainsi qu'à toute la troupe de romanichels . Les villageois leur crachèrent au visage et leur lancèrent des pierres. Gaspard, caché attendit la nuit pour rejoindre Alexander et la troupe sur le chemin de l'exil.
-Je suis désolé Alexander c'est à cause de nous que vous avez tout perdu : votre notoriété, votre travail, votre honneur !
-Bah ! J'ai ma conscience pour moi ! Lui dit le maître ferrant ! Je ne supporte pas l'injustice, et le racisme : ce dont vous souffrez vous les bohémiens et les gens de couleur !
Accompagné de ses nouveaux amis, Alexander poursuivit sa route.
Chapitre III
Anton
Anton vivait aussi en Russie, dans une ville sur la Volga .Il travaillait dans une imprimerie au service du star : c'était un chef respecté car très compétent.

Homme instruit, il aimait les arts. Il avait une bonne quarantaine d'années et se rendait souvent à l'opéra au théâtre , aux expositions avec sa femme Rebecca et ses trois filles.
Il aimait beaucoup les écrits d'un grand écrivain russe, qu'il avait publié des années auparavant mais qui, était aujourd'hui interdit . Cet intellectuel Mickaëlys avait été banni et proscrit. Il avait trouvé refuge chez Anton .
Anton lui fournirait de faux papiers pour passer la frontière de Pologne.
Tout était prêt pour son départ mais la police avait été mise au courant : Anton hébergeait un clandestin recherché . Par chance, une des filles d'Anton fréquentait un des officiers du star. Il l'avait prévenue. Ainsi quelques heures avant l'arrivée des gardes, toute la famille d'Anton avec Mickaëlys avaient quitté la ville. Le jeune officier avait promis de rejoindre sa fiancée plus tard, pour ne pas éveiller les soupçons.

Partis à travers la campagne russe en plein hiver , le chemin risquait d'être long. Les espoirs de rejoindre la frontière de Pologne étaient tombés à l'eau car la police les y attendrait. Ils prirent donc la direction de l'est.
-Merci ! dit Mickaëlys à Anton ! Merci et pardon ! A cause de moi vous avez tout perdu et compromis l'avenir de vos enfants !
-Non Mickaëlys ! J'ai conservé l'essentiel : ma dignité d'homme libre, ma liberté d'expression, l' estime de moi . Comment aurai-je pu me regarder dans une glace, si je ne vous avais pas aidé à sauver votre vie ,vous le maître de la libre pensée, vous l'expression vivante de la science du savoir , de l'art de ce qu 'il y a de plus grand chez l'homme : la culture , le savoir ?
Chapitre IV
Eléonor
Alexis, Alexander et Anton cherchaient chacun de leur coté un refuge pour leur famille, et leur amis.
C'est le vieillard qui guida Alexis dans le brouillard et le froid jusqu'à une grotte au dessus de laquelle une étoile du firmament, brillait plus que d'habitude.

-C'est là ! On nous attend !
Alexis et les siens furent surpris de ces propos mais le suivirent .
Ils pénétrèrent à l'intérieur et une douce chaleur venue des sources d'eaux chaudes qui jaillissaient ici et là, leur procurèrent bien-être et réconfort. Des torches allumaient cet endroit si accueillant. Dans un recoin, ils virent un couple . La femme était allongée. L’homme se leva et alla à la rencontre d'Alexis :
-Soyez les bienvenus ! Je sais ce que vous venez d'endurer ! Mon épouse (dit un homme à la longue barbe rousse) va accoucher bientôt. Y a t- il parmi vous quelqu'un qui saurait l'aider ?
-Nous ! Dirent en choeur Ivanovna et Natacha .Nous étions les « marraines « des enfants du village avant que l'on nous chasse ! Nous allons l'aider.

La jeune future mère leur dit:
-Merci ! Je m'appelle Isadora voici Dimitri mon mari . C'est notre premier enfant.
-Ne vous en faites pas ! dit Natacha. Tout va bien se passer !
Deux heures s'étaient écoulées quand on entendit des voix assez fortes s'approcher .Alexander guidé par Gaspard ,avaient repérer la grotte et arrivaient avec les bohémiens.
On fit les présentations alors que la jeune future maman ressentait les douleurs de plus en plus vives .Ivanovna sut la soulager .
Cela faisait bien quatre bonnes heures que tout ce petit monde était à l'abri du froid, qu'on entendit de nouvelles voix : c'était Anton , sa famille et Mickaëlys qui ayant vu ,eux aussi l'étrange étoile briller ,et l'avait suivie jusqu'au pied de la grotte .

Les présentations faites ,on partagea ce qu'on avait pu sauver lors de l'exode : le pain , le vin, la viande séchée, les fruits.
Il était probablement minuit, lorsque l'enfant vint au monde : une jolie petite fille aux cheveux d'or.
-Eléonor ! Dit sa maman . Voici Eléonor .

Tous l'embrassèrent.
-Que va t-on offrir à cet bel enfant ?Dit le vieillard sur un ton mystérieux ?
Tous se consultèrent.
Le vieillard sortit de son manteau une cassette dorée et y déposa trois pièces d'or :
-Voilà mon offrande Eléonor ! Dans cette boite je mets trois pièces d'or qui représentent tout ce qu'Alexis m'a montré : le courage, la pitié, la bonté. Que ces vertus t'accompagnent tout au long de ta vie !

Tous furent très émus par les paroles du sage.
Gaspard alors s'approcha avec trois pierres lumineuses qu'il sortit de ses poches :
- Je les dépose dans cette boite . Elle symbolisent les vertus d'Alexander mon sauveur : la tolérance, la solidarité , le respect .Puissent -elles ces valeurs être présentes chaque jour ,dans chacun de tes actes !

Arriva le tour de Mickaëlys .Il déposa dans la boite d' Eléonor trois présents : un bâton d'encens représentant l'abnégation , une plume pour la connaissance ,et une branche de sapin symbolisant la liberté :


-Puisses-tu ,jeune Eléonor porter le plus loin possible ce message de liberté et de savoir pour ouvrir toutes les portes des prisons de l'ignorance et de l'obscurantisme !

Les bohémiens précédés de la jeune Mira déposèrent à leur tour : la baguette de la magie,

la bougie de la lumière et de l' art et la rose de l'amour et de la paix

.
Mira s'approcha du bébé et l'embrassa sur le front :

-Que la Providence te vienne en aide ! Et que l'Espérance guide tes pas !
Ainsi la boite d’Éléonor renfermait-elle, toutes les vertus ,toutes les valeurs pour reconstruire un monde nouveau fraternel où chacun aurait sa place et où le soleil brillerait pour tous ,éternellement !