
Le trouble d'Aurélie
deuxième partie
Aurélie et Jocelyn s'étaient quitté. la jeune femme n'avait pu répondre à la demande pressente du jeune artiste : tout quitter pour lui . Elle lui avait demandé du temps, d'attendre pour se préparer, elle, à ce soudain changement et pour préparerai aussi, tous les siens : son mari Martial et ses enfants.
Le temps avait couru sur les fougères et les champs, depuis leur dernière conversation peut être une année, sans nouvelles de Jocelyn .
La jeune femme attendait toujours un message un geste de son soupirant, tuant le temps en besognes domestiques , en réceptions et en promenade.
Aurélie aimait faire chaque jour, qu'il fasse grand soleil qu'il pleuve qu'il vente qu'il neige, qu'il gèle, une promenade au delà de ses terres dans la nature luxuriante , dans ces paysages bucoliques de la campagne limousine façonné de petites collines, baignées de ces petites rivières fraîches qui coulent inlassablement sur des avenues de cailloux jalonnées de nénuphars et de myosotis . Elle arpenta une de ces collines et arriva à la cime. La chaleur était vive. Elle décida de redescendre , traversa une foret de hêtres et de chêne et prit la direction du manoir.
C'est là, qu'en chemin , elle découvrit un homme retourné sur le ventre . Il portait une casquette et une veste d'ouvrier. Elle s'approcha :
-Monsieur !
L'homme ne répondit pas. Elle le retourna doucement et poussa un cri. C'était Jocelyn.
Il était blessé et saignait . Il ouvrit les yeux .
-Aurélie ?
-Oui ! Que vous est il arrivé ? Vous saignez ? Vous souffrez ?
Il ouvrit la bouche pour lui parler mais s'évanouit. La jeune femme partit chercher du secours . Quelques minutes plus tard, la charrette était là avec les domestiques . On conduisit Jocelyn au manoir .
Le médecin arriva , soigna et questionna Jocelyn :
-Vous avez reçu une balle, heureusement elle n'a fait que vous effleurer !
Jocelyn cherchait une excuse un mensonge une explication plausible . L'homme de sciences lui dit :
-Jeune homme , je ne vous demande rien ! Je ne suis pas de la police ! Mais il vous faut rester alité une semaine pour panser votre plaie et reprendre vos forces.
-Merci ! Balbutia Jocelyn, reconnaissant.
Il fut bien soigné. Aurélie était aux petits soins avec lui ainsi que Fadette et les gens la maison. Le médecin venait le voir une fois par jour. On demanda aux domestiques de garder leur langue. On leur fit croire qu'il s'agissait d'un règlement de compte entre jeunes gens pour une question de dettes, de jeu , dette d'honneur...
Jocelyn se confia à ses hôtes : il avait participé à la Commune de Paris. Il était rédacteur dans la voix du peuple, le journal communard et avait organisé le ravitaillement de la ville assiégée par Tiers et les Versaillais. Quand les canons de la réaction détruisirent la ville et le rêve révolutionnaire de la commune, les dirigeants furent presque tous fusillés. Louise Michel son amie, fut déportée en Nouvelle Calédonie comme tant d'autres vaillants communards. Jocelyn avait pu fuir mais il avait reçu une balle. Il prit la diligence pour retourner dans le Limousin et se cacher chez ses parents . Mais il avait trouvé, à son arrivée la porte clause . Blessé ne sachant où aller, il avait pensé à Aurélie qui demeurait à quelques kilomètres.
Le couple cacha le jeune insurgé qui reprit des forces de jours en jours.
Lorsqu'il fut remis et qu'il put marcher, Cadette lui fit découvrir sa belle campagne. De son coté ,il lui apprit la peinture à observer les formes, à ressentir les sensations . La jeune adolescente révéla des capacités artistiques jusqu'alors inavouées.
Jocelyn décida de quitter ce refuge douillet, pour retourner à Paris.
-C'est pure folie ! Lui déconseilla Aurélie
-En effet les Versaillais, Tiers et les hommes de la réaction auront tôt fait de vous arrêter ! S’exclama Martial.
-Je ne peux abuser d'avantage de votre hospitalité ! Expliqua Jocelyn
-Si c'est l'unique raison de votre départ, Jocelyn ( lui dit Martial ,)sachez que vous êtes ici le bienvenu . C'est humain d'aider ses amis .
-Merci . Murmura Jocelyn mais je dois savoir où sont mes amis, ce qui leur est arrivé .
-Alors prenez une nouvelle apparence ! Proposa Martial . Rasez votre barbe, peignez vos cheveux, revêtez des habits de travailleurs et logez dans un petit hôtel parisien . Ne dites jamais qui vous êtes ! Pour les papiers, je vous en fournirai de faux .
Ainsi fut fait et un beau matin, un homme Jacques Bonnefoy charpentier de métier prit la diligence pour Paris.
Jocelyn donna des nouvelles à Aurélie. Tout allait bien pour lui mais ses amis étaient en prison ou déportés....Dans ses lettres, il évitait de parler de choses importantes craignant qu'une de ses missives ne soient lues inopinément. Le temps passa et Aurélie n'eut plus de ses nouvelles pendant une année.
Martial retourna seul à Paris pour ses affaires.Il promit à Aurélie de prendre des nouvelles de Jocelyn. Lorsqu'il fut de retour trois semaines plus tard, il avait cette mine déconfite et triste que sa femme lui connaissait lorsqu'il avait une mauvaise nouvelle à annoncer .