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La nuit de Noel
Noël 1786
L'officier de police Lieutenant Jeanret avait posté des sentinelles de surveillance sur les trois chemins montant aux Hautes Chaumes.
Il savait Simon démuni sans nourriture, n'ayant pas de vêtements chauds pour passer l'hiver et sans argent .
Il pensait que tôt ou tard attiré par la faim le froid ou le danger (les loups étaient nombreux à roder dans les Hautes Chaumes) ,il serait obligé de redescendre et d'emprunter un des trois passages obligés.
Il avait dit à son collègue Baudry :
-J'ai tout mon temps ! Pas lui !
Cela faisait un mois et demi que Simon s'était réfugié dans les Hautes Chaumes, dans une de ses jasseries petite maison pour les brebis .Il avait retrouvé des peaux de mouton qu'il avait cousues et il s'était fait avec un grand manteau chaud .Il avait également réalisé une « chapka « qui lui couvrait la tête.
Il avait épuisé les maigres nourritures qui étaient restées de l'été dernier : les fromages, le seigle quelques pommes de terre.Pour se réchauffer, il avait disposé de pas mal de bûches de bois stockées depuis le printemps dans une remise. Dans les Hautes Chaumes il n 'y avait pas de forets proches ,seuls quelques arbustes .Il fallait redescendre pour récupérer le bois .
Il avait pu tenir un mois et demi , puis les vivres vinrent à manquer cruellement.
Au village son épouse Margot se faisait un sang d'encre ainsi que sa famille et leurs amis.Deux d'entre eux , tentèrent une expédition pour aller le ravitailler mais ils furent arrêtés et jetés en prison pour tentative de complicité avec un assassin. Ils se défendirent disant qu'ils étaient partis avec des victuailles et des fusils pour chasser les loups dont la peau était si prisée des bourgeois.Devant un manque de preuve, grâce à l'intervention du curé et devant l'hostilité des villageois on ne les garda que quelques jours et on les libéra .
Désormais tous les chemins qui menaient aux Hautes Chaumes étaient proscrits.
C'était la nuit de Noël
Ce jour là le village devait préparer la crèche à l'église.
La tradition voulait que chaque famille participe soit à la crèche soit à la chorale soit au repas des bergers pris dans une salle du château pour l'occasion aménagée et chauffée....
Le vieux prêtre le père Raymond , tomba brusquement malade .Les fidèles demandèrent au diocèse un remplaçant . On les informa que tous les curés étaient pris cette nuit là mais que deux moines viendraient le remplacer .
Ils arrivèrent par une route surveillée par les hommes de Jeanret .L'un d'eux présenta un papier :
-Bonsoir mon père, dit le policier !
-Bonsoir ! On nous attend !
-Oui on nous a mentionné l'arrivée prochaine de deux moines pour remplacer le père Raymond ! Vous venez d'où ?
-De Montbrison !
-Par cette route ? Mais elle descend des Hautes Chaumes !
-Je connais cette région mon fils ! J'y ai vécu enfant ! Nous avons pris un raccourci pour arriver avant la nuit et pour la messe . Vous êtes bien au courant de notre arrivée ?
- Oui ! Oui ! Ils vous attendent !
Un policier s'approcha ?
-Vous venez de là haut ?
-Oui.
-Et vous n'avez rencontré personne ?
-A part le vent la neige les loups que nous avons fait fuir ...personne !Pardonnez-nous mais nous sommes très pressés : nous n 'avons toujours pas préparé notre sermon avec le père Raymond .Vous viendrez à la messe ?
-Non ! Répondit Jeanret ! Nous sommes en service au cas ou le fugitif que nous traquons redescende cette nuit de Noël !
-Bon courage et que dieu vous garde !
Les deux moines se rendirent à l'église auprès du prêtre qui était ...mourant. Il leur confia tout son ministère, et ses recommandations....
Les moines organisèrent la messe et demandèrent à voir l'aubergiste Robert pour le vin de messe qui manquait.On alla chercher Robert.
Robert dissimula un large sourire et se rendit aussitôt chez Margot.
Ce fut une belle messe .
Les moines habillés de blanc pour l'occasion, une capuche bien enfoncée sur la tête, dissimulait leur visage.
Le plus âgé des moines fit un sermon évoquant l'évangile et la naissance de Jésus. La crèche vivante était magnifique et tous les villageois semblaient heureux !
Les policiers étaient à l'extérieur. Jeanret et Baudry avaient fait le déplacement convaincus que Simon sortirait de sa tanière la nuit de la nativité.Ils inspectaient le village, et vinrent un moment dans l'église au moment où la crèche s'anima . Les deux moines auprès de leurs ouailles récitaient des prières accompagnées du chant de la chorale....Tout se passa bien et se termina par un fou rire général quand l’âne aussi têtu qu'un âne, refusa de sortir et se mit à courir dans l'église avec à ses trousses ,deux brebis et un chat....
Minuit sonna .Les familles se rendirent au château pour partager le repas de la nativité.
Jeanret restait posté devant la porte de Margot. Celle- ci était dans la salle de la seigneurie.Les moines vinrent bénir le repas et s'associer à la communauté ….
A l'extérieur Jeanret et ses hommes grelotaient de froid.Ils entendaient les villageois chanter, et s'amuser.
Puis on se sépara...Margot rejoignit sa demeure un des deux moines portait son plus petit endormi dans ses bras.
-Il s'est endormi ! Le petit ange ! Dit l'homme au capuchon à Jeanret.
-Merci mon père ! Venez prendre une petite liqueur !
-Je ne veux pas vous dérangez , ma fille , il est bien tard !
-J'insiste !
-Vous aussi ! Proposa Margot à Jeanret .Venez boire une liqueur qui vous réchauffera !
-Non merci ! Vous savez pourquoi je suis ici !
Margot n'insista pas. Le moine pénétra à l'intérieur de la maison, portant le petit.
Il n'y resta pas longtemps peut être cinq minutes puis prit congé.
-Joyeux Noel à vous et bon courage madame ! Dit- il à la jeune mère !
- Bon courage et joyeux noël à vous aussi ! Ajouta t- il en s'adressant à Jeanret.
L'homme d'église rejoignit la cure.
Le lendemain eut lieu l'office de Noel avant midi.
Les villageois bien que fatigués de leur veillée assistèrent en grand nombre .
Les policiers transis de la veille , avaient pris du repos à l'auberge et avaient été remplacés .
Les nouvelles recrues étaient aux aguets : le proscrit Simon Monteban pouvait fort bien venir le jour de Noel.
.Les moines furent conviés dans les familles au repas .Le plus ancien se rendit chez le forgeron et l'autre chez Margot.Ils y passèrent la journée.
Comme il était tard, ils décidèrent de dormir à la cure et de repartir le lendemain avant la neige qui s'inviterait dans la soirée .
Le 26 décembre, nos deux moines reprirent le chemin de retour .
-Vous allez repassez par les Hautes Chaumes ? Questionna Jeanret qui s'était remis de sa fatigue.
-Quoi de plus rapide ? Lui répondit un des moines ?
-Vous n'avez pas peur des loups ?
-Le loups ne sortiront pas ce matin , il fait trop doux . Nous devons faire vite car la neige tombera en fin de journée ! Les paysans nous l'ont assuré . Nous ne pouvons nous attarder .Au revoir et que la paix de Noel soit avec vous ,mon fils !
-Bonne route ! Leur répondit Jeanret pensif !
Ils allaient partir quand des villageois les rattrapèrent :
-Voici pour votre présence pour nous avoir fait passer un bon Noel ! . Il y a un jambon du pain du lard des pommes de terres, du miel du vin des confitures des crêpes . C'est de la part de nous tous, du village !
-Merci mes enfants ! Ma foi on ne peut refuser ces cadeaux si sincères ! Merci et que Dieu soit avec vous .
Dans le petit groupe il y avait Margot avec ses enfants , les aubergistes , le forgeron, de cordonnier, des paysans.
Jeanret s'approcha des gens :
-Ils étaient parfaits ces moines ! Lui lança le forgeron ! Et notre prêtre ? Allons voir comment il va !
Ils plantèrent le policier .
Déjà au loin ,les silhouettes des deux religieux avaient disparues.