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 chapitre IV Le procès deuxième partie

Le verdict

Le procès commença . Tonin, Joaquim et Xavier furent introduits dans une grande salle. Placés dans le boxe des accusés, ils rejoignirent quatre autres hommes. Face à eux, un jury de militaires assisté d'un homme d'église.

-Gabriel Bonaventura ! Levez-vous ! Vous étiez commandant !

-Parfaitement!

-Vous êtes accusé d'avoir exécuté trois officiers nationalistes ainsi qu'un bon nombre de nos partisans. Qu'avez -vous à dire pour votre défense ?

-Rien ! Ou plutôt, si ! Je regrette de n'en avoir pas fusillés davantage, chiens de Fascistes !

-Assez ! Taisez-vous !

L'homme voulut poursuivre ses injures, mais il fut expulsé. Le jury se consulta brièvement. Le verdict tomba :

-Condamné à mourir, demain à l'aube !

-Joaquim Cruz, levez-vous !

Le prêtre se redressa. Tonin l'observait. Il était d'une très haute stature, bien fait, jeune, avec un regard profond. Il toisa ses accusateurs.

-On vous reproche d'avoir servi l'ennemi, votre propagande socialiste et vos faits politiques contraires à votre charge !

Joaquim prit la parole . Le silence se fit :

-Vous dites que je suis accusé d'avoir servi l'ennemi ! Mais de quel ennemi parlez-vous ? Des hommes, des femmes des enfants miséreux. La religion ne se connaît pas d'ennemi parmi les malheureux! Vous dites que j'ai fait de la propagande socialiste : mais je n'ai fait qu'assister les ouvriers d'Oviedo dans leur misère ! La place d'un prêtre n'est -elle pas d'être auprès de ses fidèles, de ses ouailles qui souffrent parce qu'elles ont faim et parce qu'elles sont opprimées ? Mon crime est d'avoir essayé d'endiguer la pauvreté et de porter réconfort matériel et moral aux plus démunis. N'est ce pas le rôle des ministres de l'Eglise ? Vous avez ajouté que j'étais responsable de fait politiques contraires à ma charge donc à la foi catholique. Mais je ne trouve proscrites nulle part dans la bible les soi-disantes idéologies politiques contraires à la foi ! Je n'y trouve qu'une immense espérance en un amour entre les hommes, dans un partage égal des richesses comme le préconisait le fils de Dieu dans le respect de chacun. J'y trouve la parole de Jésus ….

-Je vous interdis de parler de Jésus ! Rugit l'homme d'église. Vous avez bafoué l'image de l'église ! Vous êtes un agitateur ! Vous êtes possédé du démon ! Vous n'êtes plus le serviteur de Dieu !

Joaquim voulut continuer mais le verdit tomba :

-Condamné à mort !

-Miguel Zastra !

Un petit homme à l'abondante moustache obéît !

-Vous êtes accusé de trahison ! Vous avez déserté et vous êtes passé à l'ennemi !

-Mai j'étais en mission pour vous ! Le colonel Cuadros m'avait donné des ordres !

-Nous avons sous le yeux les ordres du colonel !

Le jury se consulta .

Tonin et Xavier discutaient :

-C'était une taupe venue espionner chez nous ! Je suppose qu'il a mal accompli sa mission. Ils veulent s'en débarrasser ! Il sait trop de choses sur Cuadros et il ne sait pas tenir sa langue.

-Tu as raison :  ils ne badinent pas avec leurs espions !

La sentence fut prononcée :

-Condamné à mort !

-Non je vous en supplie ! Je ne veux pas mourir ! Je peux vous rendre des services ! Je sais de choses ….

-Expulsez-le !

Le procès reprit :

-Xavier Zapata ! Levez-vous !

Le professeur réajusta ses lunettes :

-Vous êtes accusé d'écrits subversifs, de propos louant la révolte et le terrorisme ; d'articles dans « une certaine presse » critiquant et souillant l'Eglise et l'Espagne !

-De quelle Espagne parlez-vous ? S'il s'agit de Votre Espagne, celle de l'ignorance de la superstition de la misère de l'intolérance, alors oui ! J'ai pris mon arme de combat qui est ma plume, pour m'insurger contre la tyrannie et votre armée despotique .Pour moi ,la plus grande victoire de l'Homme dans l'Histoire ,est la conquête de son entière Liberté. De sa liberté intérieure, par la connaissance et l' instruction, et de sa liberté extérieure « dite sociale « , par la lutte contre toute forme d'aliénation et d'oppression que sont : les religions, les partis, l'argent ,les pouvoirs...

-Vous reconnaissez être un partisan de la révolte et du désordre ?

-Je reconnais être un « Républicain » et être ,comme disait notre « grand Fédérico Garcia Lorca » que VOUS avez assassiné, être du parti des pauvres !

Sur ce , on lui coupa la parole. La sentence ne se fit pas attendre :

-Condamné à mort !

Xavier voulut parler:

-Ceci est une mascarade de procès : vous violez les lois élémentaires de la guerre : ce n'est pas un jury , mais un peloton d'exécution. Où sont nos avocats ? Nous avons le droit d'être défendus !

Comme il continuait, on le fit expulser !

Tonin se sentit seul. Il regarda en direction de Joaquim qui lui sourit .

-Julian Florès !

Un homme se redressa. Il tremblait.

-Vous êtes caporal dans les armées rouges !

-Oui balbutia t il !

-Plus fort ! Parlez plus fort !

-Oui !

-Vous avez été fait prisonnier à l'assaut de Belchite.

-Je n'ai fait que répondre aux ordres !

Sa voix était chancelante . Il supplia

-Je vous en prie ! ne me tuez pas ! Je n'ai rien à me reprocher et je peux vous apporter certaines informations !

-Trop tard ! Les nationalistes n'aiment ni les rouges ni les traîtres et encore moins les lâches et vous êtes les trois à la fois !

Il fut également condamné à mort.

-Raphaël Mescados !

-L'homme était d'une stature d'athlète.

-Vous êtes un rouge et comme tous les rouges vous avez commis des actes contraires aux lois de la guerre : pillage, chantage, tentative de viol. Qu'avez- vous à dire ?

-C'est faux ce ne sont que des calomnies !

-C'est ce que l'on va voir ! Faites entrer les témoins !

-Une jeune fille très belle et deux hommes vinrent apporter leurs explications accusant sans retenue et sans détour, ce criminel de droit commun jugé en même temps et dans les mêmes conditions que les Républicains de la guerre civile d'Espagne.

-C'est inadmissible ! Vous voulez faire passer les Rouges pour de vulgaires délinquants et criminels. Mais qu'avons nous à voir nous les intellectuels, les prêtres, les soldats, les officiers de la République avec cet individu là et avec tous les parias de la société ?

-Taisez vous , Joaquim Cruz ! Expulsez-le lui aussi !

Et Joaquim fut tiré de force hors de la salle du tribunal. Il adressa à Tonin un signe d’encouragement. Le verdict tomba :

-Mescados, condamné à mort !

-Antonio Orensanz , levez-vous !

Tonin s'exécuta. Il était le dernier des accusés, le septième !

-Pourquoi avoir opté pour les armées rouges et pourquoi n'avoir pas rejoint le contingent nationaliste de Jaca qui vous avait appelé et vous avait nommé sergent ?

Tonin ne répondit pas immédiatement : il venait d'assister à six condamnations capitales. De cette brève expérience dramatique, il en tira les leçons : savoir répondre certes car l'honneur le commandait sans violence verbale, sans attitude provocatrice. « Il faut vivre » lui avait demandé Xavier et Joaquim : « Tu peux sauver ta tête » Fais -le pour nous ! Pour notre mémoire. »

Il entendait les propos de ses camarades de captivité.

-Eh bien répondez ! Ordonna le colonel franquiste.

Tonin revint à la réalité : il s'adressa calmement avec dignité à ses juges :

-« L'Espagne est notre mère à tous . Comme beaucoup de mères, celle-ci à plusieurs enfants. Tous l'aiment ,mais chacun à sa manière avec sensibilité d'un même amour. Tous ne suivent pas forcement le même chemin, mais chacun d'entre eux est animé d'une ambition majeure : celle de réussir de servir leur mère dans l'honneur et la grandeur. Qui reprocherait à une mère d'avoir des enfants différents ? Eh bien moi, je suis comme vous : un des enfants de l'Espagne. J'ai suivi un chemin différent du vôtre. J’ai lutté pour l'Espagne de « manana, demain. »Je ne suis pas d'accord avec vos conceptions .Je ne regrette pas ce que j'ai fait ,car je l'ai fait en toute conscience .J'ai lutté pour une grande Espagne qui eut été la « lumière de l'Europe » Une Espagne libre. N'était ce pas aussi votre ambition ? Oui j'ai été lieutenant du général Ortiz, le général sans Dieu ni maître puis capitaine ! Je n'ai jamais eu à rougir de mes exploits et de mes actes ! Bien au contraire ! Nous nous sommes battus vaillamment avec honneur et sans faiblir.

-Je sais ( coupa le colonel), le général Tocana m'a parlé de vous !

Tocana était le militaire franquiste qui était venu saluer Tonin ,Ramon, et Vicente lors de leur reddition

Tonin avait fait impression. Les jurés l'avaient écouté avec intérêt. Tonin avait eu tout enfant, ce don de la parole, ce génie de comédien qu'il avait exprimé à l'école tout petit, puis au théâtre à Jaca dans sa compagnie..Il s'en était servi aussi à l'armée , pour commander ses hommes.

Après un long moment,le jury rendit son verdict :

-Condamné à vingt ans de prison !

Il fut reconduit dans son cachot . Xavier et Joaquim l'attendaient :

-Alors ?

-Vingt ans de prison !

-Bravo ! Tu as sauvé ta tête !

-Oui mais vingt ans !

-Les choses vont changer ! Les américains viendront bien en Europe pour écraser le nazisme. Ils y sont obligés....Il délivreront l'Espagne du franquisme ,et alors tu seras libre....

Il ne restait que quelques heures à vivre ensemble avant « manana, demain » Ils les remplirent en discutant et en chantant des hymnes républicains

    chapitre IV :  le procès 2 ème partie
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